Le cycle de vie, fait de mobilité et de sédentarisation, est à la base de l’organisation sociale et de la multiplication des identités. Des hommes et des femmes, pour qui le temps n’a pas encore tout à fait marqué le pas se croisent au carrefour de multiples identités, chacune porteuse d’un héritage spécifique. Ainsi, le Congolais prendra toujours le temps de prendre son temps. Bavarder longuement sous tous les prétextes et de préférence avec une bière ou un sucré, ou papoter chez la voisine en se faisant tresser les cheveux, semble être sa philosophie de vie.
Rien à faire ici, plus que jamais le temps est élastique. A chaque identité correspond une relation communautaire particulière avec ses codes, ses idéologies et ses modes de fraternités, ainsi peuvent se mettre en place et coexister la communauté de parenté, de village ou du quartier, de l’ethnie et de la région.
COMMUNAUTÉ CLANIQUE
Ensemble de lignages ayant les mêmes interdits, signe de leur relation de consanguinité, le clan reste le socle regroupant des identités diverses ayant conscience d’appartenir à une même souche, même si la plupart du temps elles sont dispersées suivant des fortunes diverses.
Très souvent, le nom de la communauté est au départ un sobriquet d’origine externe qui finit par être assumé : parfois un nom d’un ancêtre, d’un site géographique ou d’une activité le plus souvent exercée, quand il n’est pas d’origine exotique tiré du contexte colonial. C’est le cas notamment de Kongo (de l’ancêtre Mani Kongo), de Lulua (rivière éponyme), de Yeke (chasseur)…
On observe deux régimes de parenté qui coexistent, le régime patrilinéaire et le régime matrilinéaire. L’influence de l’ère coloniale a fait que la plupart des communautés congolaises, notamment les Mongo et les Luba, sont devenues patrilinéaires. Actuellement, une tendance à la filiation bilatérale faisant coexister les deux parentés se confirme dans certaines communautés, notamment chez les Lunda.
Dans le système de parenté patrilinéaire, la descendance se marque par les hommes. Puisque seuls les hommes transmettent la parenté, les enfants d’une femme ne font pas partie de sa parenté mais de celle de son mari. D’autre part, dans le système matrilinéaire ou matriarcat, la parenté se transmet par la femme : le statut social et l’héritage passent non pas d’une femme à ses filles mais des frères de la femme aux frères de ses filles. C’est le frère de la mère, l’oncle maternel, qui exerce l’autorité.
La forte solidarité qui caractérise pratiquement toute la société congolaise dépend d’une structure forte que l’on peut synthétiser sous la forme de l’ethnie au sein de laquelle les individus partagent en commun un héritage culturel comme la langue, sans pour autant être uni par un pouvoir commun, ainsi que du lignage formé par une grande famille dont la parenté remonte à plusieurs générations.
Cette famille « sang » est de taille variable. Au-delà de sa forme nucléaire, elle est le regroupement de tous ceux qui ont conscience de la relation de consanguinité qui les unit. Sous cette forme, elle constitue le lignage. Celui-ci est doté d’une hiérarchie interne, les aînés ayant la charge des cadets qui leur doivent respect et considération. Chaque individu a un rôle et une place bien déterminés au sein de la collectivité, qui lui est transmis par son âge, sa sagesse, son appartenance familiale, son origine sociale, son appartenance ethnique, sa caste, etc.
Cependant, cette forme ne constitue pas la dimension maximale de la famille « sang » car la consanguinité dépasse le niveau de la conscience qui permet éventuellement d’éviter des unions incestueuses. Marquée d’interdits qui confère une forte cohésion au groupe en dépit de certains problèmes pratiques qui se posent, la hiérarchisation de la société congolaise rend difficile la transgression des lois naturelles pratiquement communes à toutes les ethnies.
La structure maximale de fraternité consanguine étant le clan, le lignage regroupe les gens qui se considèrent comme descendants d’un ancêtre commun et qui peuvent reconstituer leur généalogie à partir de celui-ci. Il est doté d’une identité par laquelle il ne peut souffrir de confusion. Les noms de clans sont des mots anciens, chargés d’histoire et qui désignent des noms soit d’ancêtres, soit de lieux mythiques, ceux-ci étant d’ailleurs souvent réutilisés comme noms de villages.
EDUCATION
Si l’éducation scolaire a pris de l’ampleur à la suite du développement du système d’enseignement au Congo hérité de la colonisation, l’éducation reste d’abord une affaire de famille, qui en assure les fondements. A une certaine époque, elle était aussi une charge collective garantie par la société, dans le sens où les parents du quartier ou du village pouvaient suppléer à l’éducation des enfants en sus de leurs parents biologiques.
Ce phénomène a été perturbé par la longue crise économique que le pays a connue et dont les conséquences ont totalement déstructuré la cellule familiale et l’autorité parentale.
Les enfants se prenant à présent très tôt en charge, contribuant bien souvent à la survie de la famille. La rue devient donc un lieu d’éducation incontrôlé. Par ailleurs, certaines familles croyantes et pratiquantes continuent à prolonger l’éducation de leurs enfants à travers un encadrement religieux. Les mouvements de jeunesse au sein des églises jouent un très grand rôle dans ce contexte.
En dépit des réformes successives qui se sont opérées au fil du temps, le système scolaire congolais tire ses origines du modèle belge. Pendant la colonisation, la scolarisation des jeunes enfants était confiée aux missionnaires. L’objectif était que les enfants atteignent le niveau primaire, voire secondaire technique pour quelques-uns, afin de fournir une main-d’œuvre qualifiée aux nombreuses entreprises qui s’installaient dans le pays et pour les postes subalternes de l’administration.
La question scolaire qui surgit en Belgique au lendemain de la deuxième guerre mondiale se répercuta sur la colonie, opposant partisans de l’enseignement officiel laïc aux défenseurs de l’enseignement libre catholique. Avec pour conséquence que plusieurs écoles officielles naîtront et côtoyront les plus anciennes ayant vu le jour dans les années 1910-1920 sous l’impulsion des missionnaires catholiques.
La première université du Congo, l’Université Lovanium en référence à l’Université Catholique de Louvain en Belgique, a été implantée à Kinshasa en 1954. Cette université « mixte » accueillait des étudiants blancs, mais également des Congolais dont les premiers étudiants se sont inscrits en 1954. Elle sera suivie de l’Université Officielle du Congo (UOC) à Elisabethville (Lubumbashi) en 1956, et de l’Université Libre du Congo à Stanleyville (Kisangani).
Alors qu’elle possédait l’un des réseaux scolaires les plus performants d’Afrique et un taux d’alphabétisation exemplaire au moment de l’indépendance, la RD Congo a vu son système scolaire se dégrader au fil des années, particulièrement faute d’investissements publics tant au niveau des infrastructures, de la formation des enseignants que de la rémunération de ces derniers. L’enseignement est donc quelque peu au rabais actuellement et le système gangrené par une corruption sans commune mesure. On parle même des « CST », c’est-à-dire les cotes sexuellement transmissibles…
Avec pour conséquence que certaines familles, ne pouvant plus compter ni sur l’école ni sur les structures sociales traditionnelles pour assurer l’éducation et la scolarisation de leurs enfants, ne s’en sentent plus responsables et se désinvestissent de ce rôle. Sans oublier que la plupart des parents doivent sacrifier une bonne partie de leurs revenus pour permettre à l’un ou l’autre de leurs enfants d’aller à l’école.
Beaucoup de ces derniers se voient donc dans l’obligation de quitter l’école, leurs parents n’arrivant souvent plus à assurer les frais de scolarisation ou n’en voyant plus la nécessité… Ces enfants sont alors formés sur le tas, comme apprentis dans les commerces et petites entreprises des villes. Très souvent ils vont gonfler le nombre de ce qu’on appelle les « enfants des rues » (shégués).
Avec les conséquences dramatiques que l’on imagine sur la société congolaise de demain, processus déjà à l’œuvre aujourd’hui au sein de jeunes adultes illettrés et non scolarisés pour la plupart, et donc hautement précarisés. Cela s’illustre notamment dans la connaissance du français (la langue de l’enseignement officielle) qui tend à diminuer au sein d’une frange de la population non instruite, qui ne parle plus que les langues nationales et dialectes et ne sait bien souvent ni lire ni écrire.
ORGANISATION DE L’ENSEIGNEMENT
De manière générale, le système éducatif du Congo est toujours calqué sur le modèle belge instauré à l’époque. Conformément à la loi-cadre sur l’éducation nationale, l’enseignement est organisé suivant les cycles suivants : maternelle (3 ans) ; primaire (6 ans) ; secondaire (général, technique ou scientifique) (6 ans) ; supérieur et universitaire (3 ans en cycle court, 2 ans de licence/master).
L’enseignement supérieur et universitaire comprend deux réseaux : officiel et privé. Le réseau officiel compte cinq universités (Kinshasa, Lubumbashi, Kisangani, l’Université Pédagogique National/Kinshasa, et la toute nouvelle université de Kindu) ; une dizaine d’instituts supérieurs techniques (Ista, Ibtp, Aba, Istm, Ifasic, etc.) et plusieurs instituts supérieurs pédagogiques (ISP/Gombe, ISP/Mbandaka, ISP/Kananga, ISP/Mbanza Ngungu, ISP/Lubumbashi, ISP/Bunia, etc.).
Des centres universitaires à Mbandaka, Kananga, Mbuji-Mayi (UOM), dans le Sankuru (Tshumbe Sainte-Marie) ainsi que d’autres établissements sont ouverts à travers le pays par le système de maillage afin de rapprocher les institutions d’enseignement des lieux de vie des futurs étudiants, étant donné l’immensité du pays et les distances à parcourir. Ce sont des extensions que l’on retrouve dans presque tous les grands centres du pays. Cependant leur fonctionnement pose problème du point de vue des infrastructures et des moyens de fonctionnement.
L’enseignement supérieur et universitaire privé, quant à lui, est très marqué par les universités confessionnelles : Université catholique de Kinshasa, Université protestante au Congo, Université Simon Kimbangu, Université William Booth (Armée du Salut). Il existe aussi des établissements non confessionnels comme l’Université libre du Congo (Ulk), l’Université bel campus et l’Université Cardinal Malula.
FAMILLE
Considérée et reconnue par la constitution du pays ainsi que par le code de la famille comme la cellule mère de la nation, la famille congolaise est confrontée aujourd’hui à un dualisme culturel qui la place devant des choix à opérer. Ceux-ci se situant entre le souci de conserver son identité culturelle et la nécessité de s’intégrer dans un monde en pleine mutation influencé par la culture occidentale découlant de la colonisation et qui s’est perpétuée après l’indépendance.
Quoiqu’il en soit, la vie familiale est marquée par trois moments particuliers, à savoir : la naissance, le mariage et la mort. Si la naissance est toujours considérée comme une bénédiction parce qu’elle assure la continuité de la famille et la pérennité du clan, la mort par contre apparaît comme un désastre, et le mariage un pont entre les familles. Les cérémonies de naissance, de mariage et de décès réunissent toujours tous les membres du clan. C’est l’occasion de faire le point sur l’état de la famille et de résoudre les différends éventuels au sein de celle-ci. Ces rassemblements sont en général présidés par la personne la plus âgée et donnent lieu à des réjouissances et des retrouvailles.
Dans l’espace et dans le temps, le lien familial était un mode pertinent d’organisation avec comme structure permanente, à la fois virtuelle et physique, la « maison » qui regroupait tous ceux qui se trouvaient autour d’un même « feu ». La famille nucléaire était donc la « famille foyer » fondée sur une alliance entre deux familles « sang », masculine et féminine, quelque soit le régime de parenté.
Elargie aux différents degrés de parenté, la famille devient et est considérée à la fois comme unité de production, de consommation et d’intégration sociale. Son organisation résulte du besoin de conservation du groupe social formant une structure et de sa dépendance au milieu naturel. La forte solidarité qui se manifestait entre les membres de la famille élargie avait pour objectif de bannir l’individualisme conduisant à l’exclusion sociale.
La rupture de la cellule familiale élargie s’est opérée avec les changements économiques issus de la période coloniale, postcoloniale et aujourd’hui de l’urbanisation du pays. Cette rupture se matérialise par un déclin progressif des solidarités traditionnelles, de l’individualisation conduisant parfois à la marginalité dont les formes les plus graves sont la délinquance, la prostitution, l’abandon des enfants ou des personnes âgées.
HOMOSEXUALITÉ
Inutile de dire que l’homosexualité n’est pas particulièrement tolérée ni bien accueillie au Congo, comme ailleurs en Afrique, au sein de sociétés encore relativement traditionnelles et fortement influencées par le poids de la religion, qui condamne cette pratique et orientation sexuelle, généralement vue comme déviante et immorale. Bien que Kinshasa et les grandes villes soient peut-être un chouia plus progressistes à cet égard, par rapport à d’autres zones plus reculées du pays.
Quoiqu’il en soit, il n’est pas de bon ton de s’afficher comme tel, et il vaut mieux être discret. C’est particulièrement valable pour les Congolais, mais également pour les étrangers et visiteurs, même s’ils seront sans doute moins, ouvertement en tous cas, réprimés.
Par ailleurs, la plupart des hôtels locaux n’hésitent pas à appliquer une forme de discrimination en prévoyant un certain supplément à payer pour l’occupation d’une même chambre par deux personnes du même sexe (même s’il ne s’agit « que » d’amis, frères ou sœurs). Quoiqu’il en soit, que l’on soit un couple hétéro ou gay, congolais ou étranger, les marques d’affection et gestes amoureux se doivent d’être relativement discrets (pas d’embrassade passionnée en rue ou dans des lieux publics). Même si en boîte ou dans les bars/terrasses prévoyant des « espaces réservés », c’est autre chose…
Par ailleurs, on voit souvent en ville deux hommes ou deux femmes adultes se tenir la main, ce qui ici ne signifie nullement qu’ils soient en couple, c’est simplement une marque d’affection assez courante entre amis au Congo et à Kin. Même si c’est en général connoté différemment en Europe.
PATRONYMES
En 1972, lorsque la politique de recours à l’authenticité fut lancée par Mobutu, l’un des objectifs majeurs portait sur la valorisation des actions et de l’existence des ancêtres. Cette valorisation devait passer par le port du nom d’un ancêtre, comme il est toujours de coutume dans les familles congolaises.
Ainsi, à part quelques familles qui ont adopté la pratique de transmission occidentale du nom du père aux enfants, qui s’est accentuée avec le croisement des cultures à travers les villes, la plupart du temps les enfants congolais ne portent pas le même nom que leurs parents. Le nom de famille étant implicitement celui du clan, qui s’impose à tous les parents consanguins, l’enfant reçoit un patronyme, son nom individuel, le prénom. Celui-ci peut être tiré d’une multiplicité de registres.
Chaque enfant se voit attribuer le nom d’un ancêtre en rapport avec l’histoire familiale, un événement précédant la naissance ou la présomption de mêmes traits de caractère. Le plus souvent il s’agit de noms de « réincarnation » (appropriation d’un nom d’un ancêtre) ou de noms de « prédestination » (immortalisation des conditions de naissance, comme celles de jumeaux, d’enfants nés en siège ou avec le cordon ombilical autour du cou).
Ainsi vous pouvez trouver des noms comme Mujinga chez les Luba au Bandundu notamment, qui caractérisent un enfant qui est né entouré du cordon ombilical ; ou Mputu, celui qui est né après des jumeaux. Les jumeaux portent des noms qui diffèrent d’un groupe ethnique à un autre : Mbuyi et Kanku ou Kabanga/Kabange chez les Luba (Katanga et Kasaï) ; Nsimba et Nzuzi chez les Kongo ; Mbo et Mpia, Mboyo et Boketshu au Bandundu et à l’Equateur ; Omba et Shako chez les Tetela, etc.
Par ailleurs, il y a aussi des noms empreints d’exotisme découlant de l’africanisation de certains mots portugais, anglais ou français, comme Kapita, Picha (picture), Kamanda (commandant), Ramazani (Ramadan), etc. Toujours est-il qu’actuellement de nombreuses familles estiment que le port automatique du nom du père renforce le lien d’appartenance à une lignée et surtout la fierté de descendre d’un géniteur connu et d’appartenir à un clan donné.
PLACE DE LA FEMME
Malgré quelques idées reçues, la Congolaise (urbaine) s’est relativement affranchie d’une série d’obstacles à son épanouissement, principalement d’ordre sexiste ou machiste et en lien avec la tradition.
Même si pour la plupart (hors classe moyenne), les impératifs de survie économique et alimentaire restent un frein à la pratique d’autres activités en dehors des métiers typiquement féminins de coiffure, couture, cuisine (les « 3 C ») ou vente au marché et au détail. Et dans lesquelles les femmes congolaises sont souvent cloisonnées, faute d’autres débouchés ou d’instruction conséquente. Mais ce sont elles qui font bouillir la marmite, dans tous les sens du terme, et qui ramènent le plus souvent des revenus au ménage, dont elles assurent par ailleurs la gestion en bonnes mères de famille, et avec une rigueur et un pragmatisme exemplaires.
Quant aux droits fondamentaux des femmes, ils sont depuis peu pris en compte à un haut niveau de l’État, avec la création d’un « Ministère du Genre, Famille et Enfant », dirigé par une femme, et s’occupant directement des intérêts de la femme congolaise. Celle-ci ayant à présent officiellement droit à l’alphabétisation et pouvant librement à l’âge voulu choisir son partenaire ou le quitter sans perdre ses droits.
La Congolaise, et singulièrement la Kinoise, est aujourd’hui dépouillée de tout complexe, de l’université au bureau en passant par les affaires ou la politique, pour celle bien sûr qui en a les moyens et la possibilité (autrement dit le niveau de scolarisation adéquat).
La constitution de la troisième République consacre par ailleurs la parité entre les hommes et les femmes, tout en renforçant son rôle d’épouse et de mère. Même si le frein le plus important à l’épanouissement des femmes au Congo reste sans conteste l’absence ou le manque de moyens visant au contrôle des naissances et à la gestion de la sexualité (banalisation de la prostitution, risque de contamination au virus du SIDA, etc.). Quoique des efforts soient entrepris en ce sens par une série d’associations et ONG actives dans le pays, visant à une meilleure information, prévention et sensibilisation à ces problématiques auprès notamment de la population féminine, incluant également les petites filles et adolescentes.
Des campagnes récentes à Kinshasa contribuaient par ailleurs à la dénonciation d’une certaine dépravation des mœurs à l’œuvre chez les jeunes Kinoises, pour les inciter à refuser des avances ou relations sexuelles en échange de cadeaux, argent ou flatteries, de la part le plus souvent d’hommes mariés plus âgés à la recherche d’un deuxième ou troisième bureau, et dont elles deviennent souvent dépendantes financièrement.
On constate en effet que ces valeurs morales fondamentales font de plus en plus souvent défaut, se perdant quelque peu au sein du cercle familial (et donnant lieu à des comportements « anti-valeurs » selon l’expression locale consacrée). D’où la nécessité de ces campagnes visant à les rappeler et les inculquer, pour que la dignité de la femme soit respectée, par les principales intéressées dans le premier chef.
Pour le reste, impossible de ne pas évoquer le sort dramatique de ces jeunes filles et femmes à l’est du pays, victimes de viols à répétition parmi d’autres traitements inhumains et dégradants dont elles sont victimes de la part des divers groupes armés sévissant dans ces régions reculées depuis une quinzaine d’années. Il est à présent avéré que ceux-ci pratiquent le viol comme « arme de guerre » afin de déstabiliser et détruire à petit feu la structure traditionnelle familiale congolaise, puisque la femme violée est bien souvent rejetée car source de honte pour sa famille.
Et ce, afin de pouvoir notamment prendre possession de territoires et procéder au pillage des ressources présentes sans entraves. De nombreux observateurs et ONG actifs sur le terrain attirent par ailleurs l’attention sur le fait que ces pratiques de viol entre autres, jadis très rares, entraînent des changements de comportement vis-à-vis de la femme et de la sexualité au sein de la société congolaise, complètement chamboulée et en perte de repères face à ce phénomène dramatique, qui par la force des choses et en l’état actuel reste bien souvent impuni, malgré la pénalisation récente du viol en tant que crime dans la loi congolaise.
RETRAITE
Le régime de retraite prévu par le code du travail ne trouve pas encore son application effective en RDC. Si l’âge de la retraite est fixé à 60 ans pour les hommes et à 55 ans pour les femmes, dans les faits plusieurs fonctionnaires de plus de 60 ans sont encore actifs dans certaines administrations. Il est en effet de notoriété publique au Congo que « prendre sa retraite est synonyme de suicide ». Le montant des pensions étant insignifiant, les agents et fonctionnaires préfèrent rester actifs pour continuer à toucher leur salaire, aussi minime soit-il. Cet état de choses peut ceci dit conduire à une forme de routine et affaiblir l’administration (absentéisme, monnayage des services, etc.)…
Par contre, les grandes sociétés privées, ainsi que quelques entreprises publiques, assurent le suivi de leurs retraités. Sur le plan institutionnel, la gestion des retraites est assurée par l’INSS, l’Institut National de Sécurité Sociale qui a des représentations dans toutes les provinces.
SANTÉ
Le système de couverture sanitaire par assurance maladie n’existe pratiquement pas en RDC. On observe toutefois l’apparition de quelques mutuelles de santé qui se mettent en place, mais généralement à des conditions assez restrictives étant donné la modicité des revenus du Congolais moyen.
Certaines mutuelles européennes, notamment en Belgique et en France, proposent cela dit une prise en charge par les Congolais de la diaspora au bénéfice des membres de leur famille restés au pays. Et les entreprises publiques et privées couvrent en théorie les frais de soins médicaux de leurs employés et des membres de leur famille au premier degré, par obligation réglementaire.
Sur le plan institutionnel, le domaine de la santé est divisé en zones de santé à travers le pays. Chaque zone de santé comprend un ou plusieurs « hôpital/aux général/aux de référence » et des centres de santé y attachés. Ces établissements sanitaires publics sont gérés par des médecins mandatés par l’Etat. Ils disposent des services nécessaires mais manquent très souvent de médicaments et de matériel.
Ainsi, la qualité des soins au Congo reste assez aléatoire, ce qui a favorisé la prolifération d’établissements sanitaires privés. Ces établissements appartiennent généralement à des médecins œuvrant dans les hôpitaux publics, à des hommes d’affaire davantage intéressés par le côté lucratif du projet, ainsi qu’à d’autres professionnels de la santé.
Par ailleurs, on observe depuis quelques années la croissance du nombre de tradi-praticiens consultés par des malades incapables de payer des soins hypothétiques administrés dans le circuit officiel. Ces tradi-praticiens utilisent les plantes médicinales et les techniques traditionnelles pour traiter plusieurs maladies.
S’il est vrai que l’herborisme traditionnel peut contribuer à l’amélioration sanitaire des Congolais, il est toutefois difficile de croire que cette médecine puisse guérir de toutes les maladies connues, comme l’affirme les différentes campagnes médiatiques de ces praticiens.
A noter également, dans un même registre, que la médecine chinoise a également le vent en poupe depuis quelques années à Kinshasa et dans les grandes villes, avec des centres de santé spécialisés de plus en plus fréquentés par des Congolais.