La constitution du 18 février 2006 consacre que la République Démocratique du Congo est un État laïc. Il n’existe donc pas en théorie de religion d’État. D’une manière générale, la religion catholique et protestante, le Kimbanguisme et l’Islam sont présents partout au Congo. La population n’a toutefois pas renoncé de manière absolue aux cultes traditionnels.
Ainsi, par syncrétisme religieux, le culte traditionnel reste fortement ancré chez la plupart des individus de sorte qu’il influence fortement la vie sociale et politique du pays. Ce à quoi s’est ajouté le culte évangélique inspiré des Eglises de réveil que l’on trouve partout au Congo et à Kinshasa, qui recueillent l’extrême ferveur (et désespoir) de la plupart des habitants au détriment des cultes classiques plus établis.
L’ANIMISME
Dès leur arrivée au pays, les missionnaires ou les prosélytes musulmans tentèrent farouchement de combattre l’animisme jugé par les uns comme une non-religion, par les autres comme une religion primitive. L’animisme ou “religion de l’âme et des esprits” n’est pas une religion universaliste, à l’opposé de la plupart des grandes religions du monde.
Chaque peuple, voire chaque village, chaque clan, possède son propre animisme, basé sur une tradition spécifique, originale, possédant des analogies avec les cultes voisins mais bien différents dans leur élaboration.
Le fétiche n’est pas la représentation d’un dieu mais il est le lien entre la Nature et le Sacré, entre le clan et le monde des ancêtres et des esprits. Ainsi, le rituel des peuples animistes ne prend de réalité que parce qu’il cimente la société et que dans leurs rapports à l’irréel, à travers la magie, les animistes vivent bien dans le réel.
LE CHRISTIANISME
Avec l’arrivée des Européens et des missionnaires, les religions catholique et protestante ont pénétré le territoire, parfois de manière brutale en détruisant les objets de culte traditionnels avec une volonté d’évangélisation des populations locales. Aujourd’hui, les cultes traditionnels côtoient ces religions, incorporant par syncrétisme certains éléments dans le culte ou la philosophie.
De cette fusion des cultes est née également toute une série de mouvements religieux dont le Kimbanguisme et le Kitawala. Aujourd’hui et officiellement, les principales religions pratiquées par ordre d’importance sont la religion catholique, la religion protestante, le Kimbanguisme, l’Islam et l’Eglise orthodoxe auxquelles s’est ajouté le mouvement dit des Eglises de réveil.
LA PREMIÈRE ÉVANGÉLISATION
A l’aube de la « deuxième vague d’évangélisation » (19ème siècle) du Congo, les premiers missionnaires catholiques et protestants qui s’établirent dans le Bas-Congo, se rendirent compte assez vite qu’ils n’y étaient pas entièrement des nouveaux ou premiers venus, et qu’ils pouvaient appuyer leur prédication sur les vestiges et souvenirs laissés par plus de trois siècles d’une évangélisation antérieure.
L’histoire de cette première évangélisation, qui remonte à la découverte de l’embouchure du fleuve Congo en 1482 par le navigateur portugais Diego Cão, est moins connue que sa légende, mais elle n’est tout compte fait pas moins belle. Elle est en outre, comme toute page de l’histoire de l’humanité, riche en enseignements.
La christianisation débuta à la fin du 15ème siècle avec l’arrivée, à la suite de Diego Cão, des missionnaires (Franciscains et Dominicains rejoints plus tard par les Jésuites et les Capucins).
Tous ces missionnaires apportèrent avec eux des objets de culte qui n’existaient pas dans le Royaume Kongo. Mais malgré les efforts menés par ces missionnaires, cette évangélisation se solda par un échec en dépit du fait qu’ils aient réussi à convertir le Roi Alfonso 1er . Néanmoins, la Congrégation de Saint-Esprit et du Cœur Immaculé de Marie se vit confier, à sa demande, la préfecture apostolique du Congo abandonnée par les missionnaires capucins depuis 1835.
Plusieurs missions furent organisées, des stations créées dans le Kwango et le Bas-Congo. Mais la situation politique à la suite de la Conférence de Berlin de 1885 eut des répercussions sur l’organisation religieuse des territoires d’Afrique équatoriale. Le Roi Léopold II ayant clairement exprimé son désir de voir son Etat évangélisé par des missionnaires exclusivement belges, le Vatican ordonna aux Pères de Saint-Esprit, qui étaient Français, de quitter le Congo.
C’est ainsi qu’en 1888, les premiers missionnaires belges arrivèrent au Congo. En 1907, les Pères de Saint-Esprit de la province belge viendront au Congo pour s’occuper des travailleurs constructeurs du chemin de fer des Grands Lacs. Ils recevront la préfecture apostolique du Katanga septentrional.
LES MISSIONS CATHOLIQUES
Il est de notoriété publique que l’un des piliers du système colonial belge fut l’Eglise catholique. Dès la création de l’Etat Indépendant du Congo, l’Eglise se voit attribuer, outre une mission d’évangélisation, un rôle de civilisation des populations. Cette tâche comprend notamment l’éducation, la santé et l’apprentissage de certaines activités économiques aux populations locales.
Dans certaines régions, dont le Katanga, les missionnaires épaulent aussi l’industrie en formant les jeunes travailleurs à la demande des entreprises, soit en prévenant toute forme de conflit et la montée du syndicalisme. En brousse, dans les endroits les plus reculés de l’administration, les missionnaires incarnent la seule forme d’autorité.
En 1876, lorsque Léopold II organise la Conférence de Bruxelles, le Saint-Siège consulte plusieurs chefs de mission sur les opportunités nouvelles de faire parvenir l’Evangile dans les contrées éloignées d’Afrique.
Le Cardinal Lavigerie qui avait fondé en 1868 la Société des Missionnaires d’Afrique, mieux connue sous le nom de Pères Blancs, répond par un long « Mémoire secret » faisant le point de la situation et offrant des missionnaires immédiatement disponibles. Ce seront toutefois les Pères de Scheut qui fouleront les premiers le sol congolais en 1888.
Au début du 20ème siècle, à la demande du Roi, le Cardinal Mercier prend contact en Belgique avec certaines congrégations pour aider les Pères Blancs et les Scheutistes dans l’accompagnement spirituel des autochtones sur cet immense territoire.
De nombreux Bénédictins, Salésiens et Jésuites quitteront la Belgique pour le Congo. Dans leur tâche d’éducation, ils ne rencontrent pratiquement aucune concurrence, à l’exception des missions protestantes tolérées au Congo. Ce n’est que vers les années cinquante que l’enseignement officiel sera réellement implanté au Congo.
Depuis lors, l’Eglise catholique au Congo est organisée et subdivisée en six provinces pastorales appelées Archidiocèses. Ceux-ci sont composés de diocèses. Il s’agit de :
– l’Archidiocèse de Kinshasa qui comprend les diocèses de : Boma, Idiofa, Kenge, Kikwit, Kisantu, Matadi, Popokabaka.
– l’Archidiocèse de Bukavu (Butembo-Beni, Goma, Kasongo, Kindu, Uvira).
– l’Archidiocèse de Mbandaka (Mbandaka-Bikoro, Basankusu, Bokungu-Ikela, Budjala, Lisala, Lolo, Molegbe).
– l’Archidiocèse de Lubumbashi (Kalemie-Kirungu, Kilwa-Kasenga, Kolwezi, Kongolo, Manono, Sakania-Kipushi).
– l’Archidiocèse de Kisangani (Bondo, Bunia, Buta, Dungu, Doruma, Isangi, Isiro, Niangara, Mahagi-Nioka, Wamba).
– l’Archidiocèse de Kananga (Kabinda, Kole, Luebo, Luiza, Mbuji-Mayi, Tshumbe, Mweka).
L’Eglise est chapeautée par la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) qui est l’assemblée dans laquelle les évêques catholiques exercent conjointement leur charge pastorale. Elle se réunit une fois par an. Sur la même base organisationnelle, les assemblées épiscopales provinciales se réunissent également. Un Comité permanent avec mandat de quatre ans renouvelable une fois, assume la charge de la Conférence.
LES MISSIONS PROTESTANTES
Les premiers missionnaires, conduits par les révérends George Grenfell et Thomas Comber de la Baptist Missionnary Society (BMS), arrivent au Congo en janvier 1878. En février, les pasteurs Graven et Telford de la Livingstone Inland Mission débutent l’œuvre évangélique à Pallabala dans la province du Bas-Congo.
Sachant que le pilier de la présence belge était l’Eglise catholique, le mouvement protestant s’organise par étapes successives et consolide son action, notamment par l’identification du Congo comme le plus grand champ missionnaire au monde (lors de la Conférence internationale des missions en Ecosse en 1910), et par la construction de l’Union Mission House, l’ancêtre du CAP, une hôtellerie commune à toutes les missions protestantes au Congo.
En 1924, le Conseil Protestant du Congo voit le jour en vue d’harmoniser l’œuvre évangélique et consolider l’unité des chrétiens protestants. Dix ans après, les instances de l’Eglise adoptent l’appellation de « Eglise du Christ au Congo » en lieu et place du Conseil Protestant du Congo.
Depuis lors, de réformes institutionnelles en regroupements, l’ECC s’est consolidée avec l’obtention de la personnalité civile et l’unicité de direction, les différentes missions devenant des sections de l’Eglise sous la conduite d’un Président national.
L’ECC compte environ 320 000 paroisses, 4 560 écoles primaires, 1 860 écoles secondaires, et une quarantaine d’institutions d’enseignement supérieur et universitaire à travers la République Démocratique du Congo. Monseigneur Marini Bodho est l’actuel président national de l’Eglise du Christ au Congo depuis son élection en 1998.
LES ÉGLISES DE RÉVEIL
Inspirées par le mouvement pentecôtiste, ce qu’on appelle les Églises de réveil sont des formations qui se déclarent issues du Christianisme, et qui sont généralement inspirées par le grand réveil religieux du 19e siècle aux États-Unis. Ce mouvement connaît aujourd’hui une grande expansion en RDC où on trouve ces églises à tous les coins de rues et dans des lieux parfois improbables. Plusieurs Eglises de réveil ont une doctrine ou des enseignements adaptés par des pasteurs indépendants tandis que d’autres font partie de dénominations structurées. Appelées aussi Églises évangéliques, leurs pasteurs n’encouragent certes pas le vœu de pauvreté…
Les thèmes abordés sont dans une très grande majorité ceux de l’Ancien Testament (bien qu’ils portent le nom évangélique) mais les pasteurs suivent également les enseignements de Jésus Christ. On découvre des tendances sectaires et même des phénomènes de prétendue sorcellerie dans certaines mouvances. Plusieurs pasteurs prétendent réaliser des miracles: ainsi, devant des foules, on les voit soi-disant guérir des malades, rendre la vue à des aveugles, la parole à des sourds, l’usage des jambes à des paralytiques, etc. La RDC regorge de très nombreux pasteurs autoproclamés, mais aussi de pasteurs sortis directement de formations catholiques, comme le Renouveau Charismatique, ou encore de confessions traditionnelles protestantes, en l’occurrence les Assemblées de Dieu. Nombre d’entre eux ne prêchent qu’auprès de leur famille ou de leurs voisins, mais d’autres remplissent des stades et des temples. Pour augmenter leur sphère d’audience et d’influence, ces Eglises disposent maintenant de chaînes de radio et de télévision, ce qui contribue à leur succès grandissant.
L’émergence des communautés et Eglises chrétiennes de réveil au Congo est un fait révélateur d’une société en pleine mutation et une réalité incontournable. Elles se regroupent en deux grandes tendances. La première regroupe les Eglises indépendantes de type traditionnel qui sont nées pendant la colonisation comme une réaction des autochtones face au comportement des missionnaires et de la situation sociopolitique du pays à l’époque coloniale. C’est le cas du Kimbanguisme en RDC. Par contre la seconde tendance issue, selon plusieurs observateurs, des Eglises pentecôtistes dont le mouvement est venu des Etats-Unis, rassemble les Eglises dites de réveil. A partir de 1974, le mouvement du Renouveau Charismatique pénètre dans le milieu estudiantin réunissant les catholiques et protestants. Dans la foulée naîtront la plupart des groupes de RC de la ville de Kinshasa, qui, au milieu des années 80, se sont mués en communauté, ministère ou Eglise indépendante de réveil. Considéré comme réponse de Dieu à son peuple face à la crise multiforme qui sévit dans le pays depuis plusieurs décennies, le réveil spirituel au Congo a sensiblement influencé le comportement des Congolais. Mais il n’échappe pas à certains écueils et excès, ses leaders profitant généralement de manière outrancière de la foi (crédulité?) des fidèles, prêts à se raccrocher à n’importe quoi pour échapper à la misère de leur quotidien. Ce qui constitue une porte ouverte à de nombreux abus, ceux-ci outrepassant bien souvent et largement leurs droits et « statut » de pasteur, titre souvent auto-attribué et proclamé. Les Eglises de réveil étant globalement, et particulièrement en RDC et à Kinshasa, considérées comme des sectes.
L’ISLAM
La religion musulmane n’est que très faiblement implantée en RDC (5 %) où sa présence est surtout remarquée à l’Est, dans les régions frontalières des pays pratiquant l’Islam tels que la Tanzanie et le Soudan. Ainsi que dans la province du Maniema, considérée comme le berceau de l’Islam au Congo, particulièrement dans le territoire de Kasongo, ce qui s’explique par des raisons historiques évidentes liées à l’occupation arabe de cette région au 19e siècle au cours des campagnes esclavagistes. Dans les autres coins de la RDC, l’Islam reste surtout la religion des « Waras » ou Ndingaris, les membres de la communauté des ressortissants ouest-africains pratiquant souvent le commerce dans les villes congolaises, dont Kinshasa. Quelques mosquées sont implantées dans les zones où les Waras habitent et commercent dans la capitale congolaise, comme à Barumbu, Lingwala ou Zone ya Kin. La religion musulmane est représentée en RDC par la plus haute instance islamique, la Communauté Islamique en RD Congo (COMICO), qui rassemble tous les musulmans, sans distinction de races, d’ethnies ou nationalités.
LE KIMBANGUISME
Le Kimbanguisme est né en 1921, en opposition à la puissance colonisatrice belge. C’est la première Eglise non missionnaire fondée en Afrique, résultant d’un syncrétisme entre le protestantisme et la tradition africaine. La Bible reste le socle du Kimbanguisme mais elle est adaptée à la culture africaine. Simon Kimbangu (1887-1951) reçoit le message divin à Nkamba au Bas-Congo et commence sa mission en 1921, en appelant le peuple à s’émanciper de la tutelle de la colonie. Assez rapidement suivi par de nombreux adeptes qui mettent l’autorité belge en doute, il est emprisonné à plus de 2 000 kilomètres de son fief alors que ses nombreux fidèles sont pourchassés et déportés. Eparpillés à travers le pays, les exportés de Kimbangu continuent de prêcher le message du Prophète. Ainsi, loin de briser l’élan de ce nouveau mouvement religieux, cela favorisera son expansion. C’est la naissance de l’Eglise kimbanguiste. En 1959, la Belgique reconnaît officiellement le culte qui est admis en 1960 par le Conseil oecuménique protestant.
Elle prend la dénomination de l’Église de Jésus Christ sur la Terre par son envoyé spécial Simon Kimbangu. Au fil du temps, l’Église se structure en faisant coexister plusieurs mouvements d’inspiration socioculturelle en son sein comme l’AFKI (Association des femmes kimbanguistes), FLUKI (Flûtistes kimbanguistes), Choreki (Chorale des enfants kimbanguistes), GTKI (Groupe théâtral kimbanguiste), FAKI (Fanfare kimbanguiste), UJKI (Union des jeunes kimbanguistes), MSK (Mouvement de la surveillance kimbanguiste), CODEREKI (les descendants des déportés), et bien sûr le fameux OSK (Orchestre symphonique kimbanguiste : voir par ailleurs). Les trois fils de Simon Kimbangu font ériger à Nkamba un temple dont la construction aura duré cinq ans, de 1976 à 1981 et qui peut accueillir 37 000 personnes, ainsi qu’à Kinshasa le centre d’accueil kimbanguiste dans la commune de Kasa-Vubu. Nkamba, la cité sainte du Kimbanguisme est aussi appelée « La Nouvelle Jérusalem ». Aujourd’hui, l’Église kimbanguiste revendique 17 millions de membres répartis en Afrique subsaharienne principalement en RDC où elle représente 10 millions de croyants, faisant de ce culte la troisième religion nationale, extrêmement bien implantée à l’intérieur du pays et à Kinshasa. Les ministres du culte sont des pasteurs protestants nommés par le chef spirituel ou par un pasteur mandaté par celui-ci. Depuis 2001, le chef spirituel et représentant légal de l’Église kimbanguiste est Simon Kimbangu Kiangani, petit fils de Simon Kimbangu né le 12 octobre 1951, le jour de la mort du Prophète dans la prison de Lubumbashi.