Aborder ou retracer l’entrée du Congo dans l’histoire revient à situer ce pays dans la durée et à identifier les éléments de sa permanence, qui justifie son identité d’hier et d’aujourd’hui et donne un sens à son devenir.
Pendant longtemps, il a été admis que la transcription de l’histoire du Congo comme celle des autres pays africains était difficile et relativement limitée à cause de l’absence de sources écrites. L’histoire se transmettant de manière orale, de sorte que la plupart des faits ont été transformés, arrangés ou ont acquis un caractère de légende selon la créativité et l’imagination des conteurs.
Cependant, certains auteurs, et principalement l’historien congolais Isidore Ndaywel dont nous nous inspirons, soutiennent que cet état de choses relève du fait que les historiens se sont longtemps désintéressés de l’Afrique. Et cela notamment à cause de la conception réductrice de la notion de « sources historiques » reconnue unilatéralement aux documents écrits, comme si les traces de l’évolution humaine devaient être exclusivement manuscrites.
En réalité, c’est sur une multiplicité de supports, réels et virtuels, que l’homme laisse les empreintes de ses aventures. Il les inscrit notamment sur le paysage qu’il transforme, sur les objets qu’il fabrique, les institutions qu’il met en place, les œuvres artistiques qu’il produit, etc. L’ensemble de ces éléments, empreintes du passé, représente autant de sources ou de documents historiques.
Ces sources sont verbales et non verbales. Dans le domaine du verbal, la manifestation sera orale, chantée, tambourinée ou écrite. Dans le domaine du non verbal, les sources les plus significatives relèvent de l’archéologie, de l’anthropologie et de la géographie. Les traces archéologiques racontent la manière de vivre des peuples du Congo et sont les premiers indices qui ont permis de retracer le passé du pays.
Parmi les sources verbales, l’on dispose d’un foisonnement d’éléments oraux (récits, contes et légendes, épopées…) ou de récits à prétention historique transmis de bouche à oreille depuis des générations. C’est la tradition orale. Certes, oralement, le récit se transforme sans doute au gré du temps ainsi que de la subjectivité et du talent du narrateur, mais quoiqu’il en soit l’histoire n’est jamais complètement objective. Les premiers témoignages oraux récoltés sont les récits de voyageurs anciens comme celui de Duarte Lopez (1591), ou les écrits des premiers missionnaires tels que Matheus Cardoso (1624), Jean François de Rome (1648), Cavazzi da Montecucculi (1654).
On observe que c’est lors des premiers contacts des populations autochtones avec les Européens ou les Arabes que l’histoire du Congo commence à être véritablement consignée. En plus des textes anciens sur la zone côtière, on dispose aussi d’écrits de voyageurs et explorateurs comme Livingstone, Stanley et d’autres. Mais là encore, une part non négligeable d’arrangements et de préjugés caractérisent les récits de ces voyageurs et autres aventuriers.
Jusqu’il y a peu d’ailleurs, l’histoire du Congo était écrite uniquement par les Européens et en particulier par les Belges, oubliant même parfois les autres pionniers, notamment les Grecs, les Juifs, les Portugais et les Indiens.
C’est bien plus tard que les premiers historiens et intellectuels congolais vont commencer eux aussi à écrire l’histoire de leur pays. A la lecture de celle-ci, on se rend compte que le Congo précolonial c’est d’abord l’histoire de lignages, de chefferies et de royaumes. Ceux-ci étaient dotés d’institutions et de structures politiques et administratives parfois complexes et qui s’appuyaient sur un ensemble de traditions diverses en fonction des régions du pays.
A partir du 15ème siècle, l’espace congolais subit deux courants d’influence originaires d’Asie et d’Europe, et en provenance des régions côtières africaines des océans Indien et Atlantique. Les premiers migrants viennent des pays arabes, d’Iran, d’Inde et d’Indonésie, attirés par le commerce de produits variés et parfois recherchés jusqu’en Chine (ivoire, écailles de tortue, ambre gris, encens, épices, or, fer…).
Traite Négrière
La traite négrière est intimement liée à l’histoire des grandes découvertes. Elle est née au départ de la convoitise et de ce besoin de ramener en métropole (Lisbonne ou Madrid à l’époque) les preuves humaines des lointaines découvertes.
Evangélisation protestante
« Terra incognita », l’Afrique commence à susciter un vif intérêt au sein des puissances européennes à partir du 18ème siècle. Plusieurs tentatives, souvent isolées, d’exploration du continent sont entreprises par des aventuriers de tout poil. Vers le milieu du 19ème siècle, ces explorations prennent un caractère plus systématique et ambitieux et de véritables expéditions sont montées pour le compte de journaux ou sous couvert de missions géographiques et scientifiques au départ de l’Europe.
Le célèbre missionnaire-explorateur anglais David Livingstone, sillonne l’Afrique centrale de 1852 à 1873. Il est rejoint à Ujiji sur les bords du lac Tanganyika par le journaliste anglais Henry Morton Stanley parti à sa recherche.
Livingstone débarque en Afrique en 1851 pour le compte de la London Missionnary Society et se rend dans les régions qui subissent la traite négrière organisée par les commerçants arabes. Il entend ouvrir le continent à l’activité économique européenne et en même temps permettre l’évangélisation de ces vastes contrées inexplorées.
L’œuvre de Livingstone et les découvertes de Stanley impulsèrent les ambitions cachées et très souvent placées sous couvert d’œuvres philanthropiques en gestation. L’objectif avoué étant d’arracher ces peuples d’Afrique de l’esclavagisme et du paganisme. L’action missionnaire a commencé à s’intéresser au continent africain dès le début du 19e siècle. De l’Afrique du Nord, de l’Ouest et du Sud, cet intérêt allait désormais atteindre l’Afrique centrale et le bassin du Congo.
Deux missionnaires de la BMS (Baptist Missionnary Society), George Grenfell et Thomas Comber, furent détachés du Cameroun pour assurer les prospectives au Congo. Arrivés à Boma en 1878, ils y furent rejoints par d’autres, notamment Henri Cravez qui construisit à Pallabala la première église protestante sur l’espace congolais.
En 1890, les premiers missionnaires de l’Eglise presbytérienne américaine dont le pasteur noir William H. Sheppard arrivèrent au Kasaï où ils fondèrent la station de Luebo. Plus à l’est, la Garanganze Evangelical Mission dont le fondateur Fred Stanley Arnot qui avait connu Livingstone lors de ses séjours en Angleterre, pénètra dans la région du Katanga (appelé alors Garanganze) en 1886, cinq ans avant que l’EIC n’y mette pied. Elle eut de bons rapports avec le redoutable chef local M’Siri, sans le convertir pour autant, et fonda la station de Bunkeya.